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2 novembre 2012 5 02 /11 /novembre /2012 17:29

 

L'arrivée de Roger Moore dans le rôle de James Bond, au début des années 1970, marque un tournant dans la série. Adoré ou détesté, le plus "british" des acteurs de la série apporte un style nouveau, tout en légèreté, où l'humour et le second degré frôlent parfois la parodie. Cet état d'esprit symbolise un monde où la détente s'est imposée, où les deux blocs se fissurent et s'ouvrent l'un à l'autre. Dans les années 1980, la guerre froide reprend (et les films s'en ressentiront), mais la menace de destruction nucléaire, ou de guerre totale, semble bien éloignée. James Bond se fait plus sérieux, mais jusqu'à la fin de la guerre froide, son rôle sera plus d'éviter les conflits que d'y participer. 

 

Le schériff J.W. Pepper, qui apparaît dans les deux premiers James Bond aux côtés de Roger Moore, est un policier américain, caricatural au possible. Maladroit, raciste et borné, il donnera beaucoup de fil à retordre à l'agent secret de Sa Majesté, qui se passerait volontiers d'un tel allié.

 

Vivre et laisser mourir (1973) est un épisode très particuliers. James Bond y affronte Kananga, un trafiquant de drogue, dictateur d'un Etat imaginaire des Amériques. Confronté aux milieux noirs de Harlem, l'agent de sa gracieuse Majesté s'en sort avec quelques pirouettes et deux ou trois blagues dont certaines frôlent le racisme. Aucun enjeu diplomatique ici, donc, si ce n'est la représentation un peu simpliste d'une Amérique soumise à la loi des gangs communautaires. 

 

Peu de diplomatie, également, dans L'homme au pistolet d'or (1975), où Christopher Lee (cousin de Ian Fleming) incarne Francisco Scaramanga, tueur à gage armé d'un revolver en or. L'action se déroulant en Chine, les Britanniques en profitent tout de même pour marquer leur souveraineté sur Hong-Kong. Les Chinois (une fois de plus) sont dans le mauvais camps: s'ils ne sont pas ouvertement ses alliés, ce sont eux qui abritent Scaramanga sur son territoire, en échange de quelques services que ce dernier peut leur rendre. 

La recherche de nouvelles énergies est évoquée dans le film, traduisant l'inquiétude britannique au lendemain du choc pétrolier de 1973.

Il est à noter que le film fut le premier James Bond à être diffusé au Kremlin où il fut, dit-on, fort apprécié. Les Russes étaient alors en graves difficultés avec la Chine...

 

Censé se dérouler en mer de Chine, le duel entre James Bond (Roger Moore) et Francisco Scaramanga (Christopher Lee) fut en réalité tourné dans la baie de Phang Nga, en Thaïlande, un lieu devenu depuis mondialement célèbre. 

 

Retour aux affaires du monde, et à la détente avec un grand D, dans L'espion qui m'aimait (1977). Britanniques et Soviétiques décident de coopérer afin de récupérer les sous-marins nucléaires qu'un milliardaire mégalomanique, Karl Stromberg, leur a volés. Particulièrement fou, ce dernier a l'intention d'utiliser ces sous-marins pour raser New-York et Moscou de la surface de la terre. Philanthrope, il espère voir naitre un nouveau monde, sous les océans. 

C'est à cette occasion qu'apparait le Général Gogol, chef des services secrets soviétiques (KGB), qui sera présent au cours des cinq films suivants. Individu roublard et aimable, tenace et sympathique, il donne du KGB une image particulièrement positive, et traite James Bond comme un ami personnel. 

Une amitié anglo-soviétique que l'agent 007 cultive dans sa liaison avec Anya Amasova, belle espionne soviétique dont il avait auparavant tué l'amant (le travail...), mais qui lui pardonnera aisément. Ce qui permet à Stromberg de conclure: "un agent britannique amoureux d'un agent russe: ça, c'est la détente!"

 

Moonraker (1979), qui adopte dès le départ un ton parodique, se poursuit dans cette optique apaisée: le méchant, Hugo Drax, prévoit tout bonnement de d'empoisonner la surface de la terre, depuis sa station spatiale, afin de créer une race d'hommes nouveaux et "parfaits". Mis à part le coup de téléphone rouge entre Américains et Soviétiques pour régler cette question, aucune référence à la guerre froide n'est faite. 

 

Tout change dans Rien que pour vos yeux (1981): la guerre froide est relancée, l'impitoyable et très atlantiste Margaret Thatcher a pris la tête du Royaume-Uni, et pour la seule fois de toute la saga, c'est l'Union Soviétique que James Bond affronte. Certes, ce ne sont pas les Russes, mais leur agent en Grèce, Aristote Kristatos, qui est l'adversaire principal. Mais il a été payé par le KGB pour récupérer un machine britannique, le "Lektor", et emploie, entre autres, un Cubain et un Allemand de l'Est dans ses rangs. 

Malgré tout, le film reste fidèle à la volonté pacificatrice de la série: James Bond détruit le "Lektor" en fin de compte, permettant aux Britanniques et aux Soviétiques de se retirer sur un match nul. Un geste approuvé par son ami le Général Gogol qui, beau joueur, admet cette issue. 

 

Octopussy (1983) reste dans cette ambiance de tension. La distinction est faite entre "bons Russes" (le Général Gogol et les hauts-dirigeants soviétiques) et "méchants Russes" (le Général Orlov, déterminé à ouvrir une guerre directe avec l'Occident). Le film, qui se déroule en partie à Berlin, est une oeuvre de propagande particulièrement bien ficelée, qui réussit néanmoins à ne pas tomber dans un manichéïsme absolu, et qui évite d'attaquer l'Union Soviétique dans son entier. Le Général Gogol, en particulier, s'oppose aux initiatives belliqueuses de son collègue, qui est finalement abattu par des soldats soviétiques après avoir tenté de passer à Berlin-ouest. 

 

Interprété par Walter Gotell (qui jouait déjà un homme du SPECTRE en 1963), le Général Gogol est le chef du KGB et s'avère un allié fiable pour James Bond. Dans deux films seulement, les deux hommes s'affrontent, mais le Soviétique agit alors comme un adversaire loyal, qui n'approuve pas les méthodes de certains de ses alliés. 

 

Un retour à la détente dans Dangereusement votre (1985), dernier James Bond de Roger Moore. Notre agent secret se voit décoré de l'Ordre de Lénine, flirte avec une espionne soviétique, en apparence tout va bien. La tension reste présente: le Français Max Zorin, industriel totalement fou qui prévoit de détruire la Silicon Valley, est un ancien du KGB. Conçu génétiquement par un ancien nazi, recceuilli par l'Union Soviétique, il n'a fait qu'échapper à ses créateurs. Le message de propagande est sous-jacent, mais il demeure. 

 

Tuer n'est pas jouer (1987) est sûrement le James Bond le plus marqué par la réalité internationale. 

Encore une fois, une limite très claire est dressée entre "bons Russes" et "méchants Russes". Les premiers sont le Général Pushkine, nouveau chef des services secrets soviétiques, le pouvoir central de Moscou, et le Général Gogol, passé aux affaires étrangères. Le mauvais Russe, Georgi Khoskov, qui se présente comme un dissident soviétique, tente en réalité de faire assassiner son supérieur, le Général Pushkine, par les Britanniques. Il a l'appui des troupes soviétiques basées en Afghanistan, dont les soldats apparaissent barbares et patibulaires. 

Les moudjahindines afghans, quant à eux, sont présentés sous un jour plutôt sympathique (on n'avait pas encore prévu le 11 septembre...) Pas aussi manichéen, toutefois, que Rambo III, le film montre leurs rapports troubles avec les Soviétiques, ainsi qu'avec des trafiquants de drogue. 

Le Général Pushkine ira jusqu'à sauver la vie de James Bond (qui lui a rendu un service similaire auparavant), et le Général Gogol le saluera chaleureusement en fin de film, tandis que le traitre Khoskov est arrêté par l'Armée Rouge. La dichotomie bons/méchants est bien respectée. 

 

Après le départ de Roger Moore, c'est Timothy Dalton, armé ici du très rare fusil allemand WA2000, qui reprend le costume de James Bond. Il jouera dans Tuer n'est pas jouer et Permis de tuer. 

 

D'autre part, le film affiche une certaine prise de distance vis-à-vis des Etats-Unis, via son méchant principal, le trafiquant d'armes Brad Whitaker. Caricature du militaire américain, admirateur de Grant, César et Napoléon, fasciné par les armes et prêt à les vendre à n'importe qui, il est abattu par James Bond dans une mise en scène où le nationalisme britannique frôle le ridicule:

poursuivi par l'Américain dans son petit musée des armées, James Bond se réfugie derrière une statue de Wellington. Au moment où son adversaire s'approche, 007 fait sauter son porte-clés explosif, précipitant la statue sur Whitaker qu'elle écrase. Au général Pushkine qui arrive à sa rescousse, James Bond fera remarquer que Whitaker "vient d'essuyer son Waterloo"...

 

Permis de tuer (1989) s'éloigne de toutes ces considérations diplomatiques, mais accentue la prise de distance à l'égard des Etats-Unis... et même de l'Angleterre puisque, pour la première fois, James Bond démissione de son poste et doit lutter contre ses propres services secrets. Il s'agit pour lui de venger Felix Leiter, son fidèle ami de la CIA, mutilé par un baron de la drogue, Franz Sanchez. 

Réunissant trafiquants américains et chinois, ce dernier note avec humour que "l'est rencontre l'ouest: dealers de tous les pays, unissez-vous!"

L'assistant le plus jeune et le plus cruel de Sanchez, Dario (interprété par un Benito del Toro encore jeune...), est un ancien des "Contras", ces paramilitaires formés par la CIA pour déstabiliser le Nicaragua. CIA qui, du reste, négocie ferme avec les hommes de Sanchez sur de sombres histoires d'armements. 

 

Il est à noter que l'URSS, alors en pleine crise, est totalement absente du film, qui se déroule intégralement en Amérique centrale. James Bond devra affronter, en vrac, des trafiquants, des Contras, des agents de Hong-Kong, et ses propres services secrets. La guerre froide se termine cette même année. James Bond mettra six ans à s'en remettre, et ce n'est qu'en 1995 que la série sera relancée. Timothy Dalton voit s'arrêter là une carrière prometteuse. 

 

 

Passage de flambeau: Timothy Dalton (à gauche) et Roger Moore (au centre) posent aux côtés de Pierce Brosnan (à droite), qui sera l'interprète de James Bond au cours de la décennie 1990.

 

 

En vingt ans, la série des James Bond aura beaucoup évolué: plus humoristique, plus grand spectacle, elle préfigure ce que seront les films d'action des années 1980/1990. La vision du monde qui s'en dégage s'articule, très globalement, autour d'un schéma simple: une puissance qui cherche son baroud d'honneur, l'Empire britannique; un allié fidèle mais un peu lourdaud, les Etats-Unis; un rival qui n'est pas un ennemi direct, l'Union Soviétique; et au milieu, des individus dangereux et des organisatons criminelles qui tentent d'exploiter ces rivalités à leur profit. 

Le passage de la détente à la guerre fraîche se ressend: amie, presque alliée dans les années 1970, l'Union Soviétique devient un rival beaucoup plus coriace dans les années 1980 - sans être jamais l'adversaire principal de James Bond. Ni la Chine, ni les nouvelles forces anti-britanniques (Iran, nationalistes arabes...), ne sont mentionnées, ou presque. 

La récurrence de méchants mégalomaniaques, utilisant la guerre froide pour leurs propres intérêts, explique en grande partie l'assèchement de la série après la chute du bloc de l'Est. Dès la disparition du SPECTRE, les James Bond s'étaient ancrés dans un monde où la détente et la rivalité entre les deux blocs se cotoyaient. Le monde nouveau qui s'ouvre en 1991, dominé par les Etats-Unis, était une catastrophe pour l'esprit même de la série, qui mettra longtemps à se renouveller, sans jamais retrouver sa grandeur passée...

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commentaires

M
The James bond series do entertain us always and so does the one eventful series that marked the lightest styles of that period and brought a new kind of entertainment among the people of the 90’s.the lightness of the characters attract the generations later too.
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S
very nice read.
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