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Chronique du choc entre les nations libres et qui tiennent à le rester, et le mondialisme ravageur qui cherche à les soumettre.

Les enjeux de l'indépendance écossaise

Les Écossais se prononceront jeudi 18 septembre sur l'indépendance éventuelle de leur pays. Très suivi en France, en raison des liens historiques entretenus par les deux nations, ce référendum pourrait marquer la fin du Royaume-Uni tel que nous le connaissons depuis trois siècles. Mais ses conséquences seront bien plus larges encore: l'Union Européenne, l'OTAN, les États confrontés à des mouvements séparatistes, et ces mouvements eux-mêmes suivent tous ce scrutin avec intérêt, espoir ou inquiétude. En réalité, les enjeux de ce vote dépassent assez largement ceux de la simple indépendance écossaise.

 

 

Une revanche sur l'Histoire?

Cela ne fait guère que trois siècle (c'est l'Acte d'Union de 1707 qui fusionna les Parlements anglais et écossais, donnant naissance au royaume de Grande-Bretagne) que l'Écosse est sous la domination britannique. Auparavant, le royaume avait plusieurs fois lutté - victorieusement - pour son indépendance. Cette mémoire est encore très forte chez les Écossais et explique le spectaculaire retour des idées autonomistes à la fin du XXe siècle.

Le Wallace Monument, à Stirling, rend hommage à William Wallace, un des héros de l'indépendance écossaise, dont le souvenir est resté très vivace.

Le Wallace Monument, à Stirling, rend hommage à William Wallace, un des héros de l'indépendance écossaise, dont le souvenir est resté très vivace.

Lors de son élection à la tête du gouvernement britannique, Tony Blair, lui-même écossais, fit voter un Scotland Act (1998) dotant l'Écosse d'un Parlement et de compétences propres dans les domaines de la santé, de l'éducation, de la justice et de la police, ou bien encore des transports. S'il espérait ainsi couper l'herbe sous le pied des autonomistes, le pari fut raté. Cette régionalisation permit surtout au parti indépendantiste écossais, le Scottish National Party (SNP) d'arriver au pouvoir en 2007.

Dès lors, tout se précipita. Le nouveau gouvernement écossais fit connaître son intention de mener le pays à l'indépendance. Pour contrer cette tentative, le nouveau Premier Ministre britannique, David Cameron, força l'Écosse à organiser au plus vite un référendum, ne laissant le choix au pays qu'entre l'indépendance ou le statut quo. Il espérait ainsi déjouer les plans du SNP, qui comptait passer par une autonomie plus large pour n'obtenir l'indépendance qu'à long terme.

Le piège se retourne aujourd'hui contre son instigateur: si jamais les Écossais votaient en faveur de l'indépendance, David Cameron en sortirait profondément discrédité et probablement obligé de démissionner. Toutefois, quand bien même le "non" à l'indépendance ne l'emporterait que d'une courte tête (52%, par exemple), ce serait une mauvaise affaire pour le Premier Ministre. Ce dernier a du, de plus, promettre à l'Écosse de nouvelles concessions si elle se maintient dans le royaume. Pour les Écossais, il s'agit d'une belle revanche sur l'Histoire: les voici désormais courtisés par l'ensemble des personnalités britanniques, qui multiplient les offres alléchantes et les appels à l'unité.

Chef du Scottish National Party, le Premier Ministre écossais, Alex Salmond, a mis tout son poids politique en faveur du "oui' à l'indépendance.

Chef du Scottish National Party, le Premier Ministre écossais, Alex Salmond, a mis tout son poids politique en faveur du "oui' à l'indépendance.

 

Une indépendance en trompe-l'oeil?

 

D'une part, même indépendante, l'Écosse resterait rattachée par bien des aspects au Royaume-Uni. Et tout d'abord par sa monnaie, les dirigeants écossais ayant fait part de leur intention de conserver la Livre Sterling. Par ses allégeance, ensuite, puisque la reine d'Angleterre resterait la souveraine officielle (pour un pouvoir, certes, très théorique) du nouvel État; ce dernier serait sûrement membre du Commonwealth et, même si les indépendantistes prônaient la sortie de l'OTAN, il est probable que l'Écosse resterait fortement attachée au "bloc occidental".

Mais quand bien même l'Écosse se libérerait-elle de la domination de Londres qu'elle tomberait sous celle de Bruxelles. Elle est aujourd'hui la seule région véritablement europhile au sein d'un Royaume-Uni de plus en plus eurosceptiques. Aussi les dirigeants du SNP n'ont-ils pas hésité à annoncer qu'ils demanderaient l'entrée dans la zone euro s'il leur était impossible de conserver la livre sterling.

Le piège est donc terrible pour l'Écosse: sa seule échappatoire à la domination britannique serait de s'intégrer autant que possible au sein de l'Union Européenne. Perdant ainsi la précieuse souveraineté qu'elle aurait tout juste acquise...

 

 

La relance du séparatisme en Europe?

L'Union Européenne pourrait aisément s'appuyer sur l'Écosse pour contrer le souverainisme britannique. Toutefois, beaucoup de pays européens craignent de voir se ranimer à cette occasion les mouvement séparatistes qui les déchirent de l'intérieur.

En France même, certains indépendantistes pourraient être tentés de s'inspirer du cas écossais, comme le montre cette caricature de propagande séparatiste bretonne.

En France même, certains indépendantistes pourraient être tentés de s'inspirer du cas écossais, comme le montre cette caricature de propagande séparatiste bretonne.

Ainsi de l'Espagne, dont les séparatistes basques et catalans observent avec beaucoup d'attention le référendum écossais, n'hésitant pas à exiger le même. Ainsi également de la Belgique, de l'Italie, de la Roumanie, de Chypre ou de plusieurs pays candidats comme la Serbie, l'Ukraine ou la Turquie.

En fin de compte, le résultat du référendum en dira long sur l'efficacité - ou non - de la politique de décentralisation, qui vise à calmer les séparatistes en leur faisant d'importantes concessions. Si les Écossais choisissent l'indépendance, les autres États en concluront que plus on encourage l'autonomie d'une région, et plus on risque de la perdre. Inversement, un "non" écossais massif montrerait qu'un peuple peut jouir d'une large autonomie tout en restant fidèle à son État central...

Indépendante ou non, l'Écosse conservera toujours son identité particulière, qui en fait tout à la fois un atout pour l'image du Royaume-Uni et un danger pour son unité.

Indépendante ou non, l'Écosse conservera toujours son identité particulière, qui en fait tout à la fois un atout pour l'image du Royaume-Uni et un danger pour son unité.

 

Pourquoi les Écossais on peu de chances de choisir l'indépendance

 

Au vu de tous ces éléments, il est probable que les Écossais voteront contre l'indépendance, à près de 52%. En réalité, ils sont d'ores et déjà les grands gagnants de cette campagne, car même s'ils demeurent au sein du Royaume-Uni, ce sera au prix des larges concessions que ce dernier leur aura accordées. Toujours plus autonomes, les Écossais garderont tous les avantage d'un maintien au sein du royaume.

Par ailleurs, une indépendance maintenant pourrait n'être qu'un trompe-l’œil. Les Écossais resteraient étroitement dépendants de l'Angleterre, à moins de se précipiter dans les bras d'une Union Européenne qui briserait rapidement leur souveraineté nouvelle.

Enfin, l'hostilité même de l'Union Européenne et des institutions mondiales à l'indépendance (soit sous l'influence du capitalisme anglo-saxon, soit par crainte d'une explosion des séparatismes) a pu effrayer les Écossais, qui préféreront rester un temps encore sous souveraineté britannique.

Un temps seulement, car il est rare qu'une région autonome ne verse pas, tôt ou tard, dans l'indépendantisme...

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R
Article très intéressant, qui resitue la situation écossaise dans sa perspective historique et son contexte géopolitique. Dommage, cependant, que tu limites les motivations du SNP à des motivations strictement indépendantistes. En réalité, le nationalisme écossais s'est développé depuis les années 1980 en contestation de la politique néolibérale de Margaret Thatcher qui a détruit le pays. La conversion des travaillistes à la "troisième voie" portée par Tony Blair n'a fait que renforcer l'influence du SNP, notamment chez les jeunes. Ce parti est aujourd'hui majoritaire en Ecosse, mais minoritaire à l'échelle du Royaume-Uni. Si les nationalistes écossais cherchent à se libérer de leur appartenance au Royaume-Uni, ce n'est donc pas pour le plaisir mais pour mener une politique alternative au néolibéralisme anglais. Dans ces conditions, l'européisme du SNP est totalement incohérent : il cherche, par refus de l'austérité, à s'affranchir de la tutelle de Londres mais pour retomber dans une Union européenne sous domination allemande, qui applique une austérité tout aussi violente que la britannique...
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A
En effet, bonne précision que je te remercie d'apporter =)
M
Bonjour,<br /> <br /> article très intéressant avec une perspective historique qui apporte beaucoup à la réflexion.<br /> <br /> Par contre je pense sincèrement que ces mouvements indépendantistes ne sont que du vent. En effet, il n'y a pas d'indépendance véritable dans un contexte où les États-Unis conservent - malgré la montée d'autres puissances - leur hégémonie, et où l'Union Européenne interdit toute véritable politique économique aux États. <br /> <br /> D'ailleurs les États-Unis sont en faveur de l'élargissement et de l'approfondissement de l'UE, pour la bonne et simple raison que ça leur permet de dominer le continent européen... Il faudrait que nos dirigeants relisent Machiavel et se demandent pourquoi nos adversaires nous encouragent dans la voie de la destruction des nations et de la construction européenne...<br /> <br /> Sinon petite question à part : pourquoi avez-vous stoppé vos vidéos sur dailymotion? Elles étaient pourtant intéressantes
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